Comment rebondir après une épreuve ?
- NicoleYam Lasry
- 12 Fév. 2023
- Durée : 15 min
La vie n’est pas un long fleuve tranquille !
Qui n’a pas vécu une épreuve dans sa vie ? Malheureusement personne.
Nous allons parler de résilience.
Qu’est-ce que la résilience ?
Une des définitions celle de Abégé et Wilson en 2005 :
« C’est la capacité de faire face ou s’adapter au changement provoqué par un événement aversif ou menaçant »
On voit dans cette définition, deux dimensions: d’abord, pour parler de résilience, on a besoin d’un contexte aversif qui est douloureux, difficile et traumatisant. C’est le contexte de difficultés, mais c’est insuffisant pour parler de résilience car ce qui nous intéresse, c’est surtout la réponse que l’individu va donner à ce contexte là.
Une réponse de résilience, c’est une réponse dans laquelle l’individu va pouvoir faire face, s’adapter, rebondir, ou résister à ce contexte là.
C’est l’individu qui a le choix. On ne sait pas si c’est mieux d’accepter, de s’adapter, d’intégrer, de faire face, ou de résister.
C’est l’individu qui va évaluer quelles sont ses possibilités, et qu’est-ce qu’il souhaite faire de ce contexte.
Donc, pour parler de résilience, on a besoin de ces deux choses :
1. Un contexte douloureux.
2. Une réponse aidante, adaptative que l’individu va donner à ce contexte
La résilience, c’est aussi un terme qui nous vient de la physique des matériaux
Qu’est-ce que la résilience des matériaux ?
C’est une propriété physique qui permet à ce matériau de retrouver sa forme après avoir été déformée.
Par exemple : un élastique, il est capable de s’étirer, de subir une tension puis de retrouver sa forme antérieure.
La résilience en psychologie, ce n’est pas exactement cela, dans le sens où il y a ce mouvement de supporter une tension, une difficulté à un moment donné, et d’accepter de transformer.
La vie transforme notre représentation qu’on s’en fait. Mais, il ne s’agit pas forcément de revenir à notre forme antérieure. Mais plutôt de découvrir peut-être une nouvelle forme, un nouvel équilibre.
En tant qu’individu, on cherche des points d’équilibre, à équilibrer notre vie, à trouver des contextes qui nous permettent de répondre à nos besoins, alors on se met en équilibre.
Et puis lorsque le contexte extérieur change et nous-mêmes, nous changeons, nous allons nous
décaler de ce point d’équilibre et nous allons certainement vivre des périodes de crise, de rupture, avec notre environnement ,nos besoins.
La notion de crise possède un double sens :
Elle désigne à la fois une souffrance, un blocage, mais aussi un mouvement, une occasion à saisir, une chance entre un sujet et son environnement familial et social.
Une crise, c’est un processus physiologique propre à tout système vivant. Elle fait partie de la vie et c’est un moment nécessaire pour qu’un changement survienne. Sans crise, aucun changement ne serait possible.
On n’est plus la même personne que l’on était il y a 10 ans, on n’a peut être plus envie d’être dans le même environnement affectif, professionnel et géographique, ou amical.
C’est pour cette raison que nous traversons des périodes d’équilibre et des périodes de crise.
Les crises sont des opportunités de retrouver un nouvel équilibre. En intégrant de nouvelles informations, des nouvelles émotions et des nouvelles données de la réalité. Et donc une crise, c’est quelque chose qui prend du temps pour pouvoir déjà en prendre conscience, pour pouvoir intégrer et peut-être se remettre dans la recherche d’un nouvel équilibre.
En France, c’est Boris Cyrulnik, psychiatre, neurologue français ; né à Bordeaux en 1937, qui va développer le concept de la résilience et surtout la faire connaître du grand public. Pour lui, la résilience est un véritable « anti-destin ».
Boris Cyrulnik pense que les pires épreuves sont surmontables ,que la guérison est toujours possible, et que nul n’est condamné au malheur.
La résilience est pour lui :
« Ce processus complexe dans lequel les blessés de la vie peuvent déjouer tous les pronostics. »
Lorsque l’on découvre l’histoire de ce psychiatre, on peut se demander si son histoire personnelle n’a pas influencé son intérêt pour ce concept.
Né dans une famille juive, son père est ébéniste, il s’engage dans la légion, durant l’Occupation, ses parents le confient à une pension pour lui éviter d’être arrêté par les Allemands. Cette pension le placera ensuite à l’Assistance Publique. Il y est récupéré par une institutrice bordelaise, Marguerite Farge qui le cache chez elle. Mais au cours d’une rafle, il est trouvé et regrouper avec d’autres juifs, dont beaucoup d’enfants, à la synagogue de Bordeaux.
Il parvient alors à se cacher dans les toilettes et éviter ainsi le sort des autres raflés, emmenés vers la gare Saint-Jean, pour y être déportés. Après , il se faufile hors de la synagogue et une infirmière le cache dans une camionnette (qu’il prend alors pour une ambulance). Il sera ensuite pris en charge et caché par un réseau, puis placé comme garçon de ferme sous le nom de Jean Laborde, jusqu’à la Libération.
Il est ensuite recueilli à Paris par une tante qui l’élève. Ses parents, eux, mourront en déportation. C’est au cours de cette expérience personnelle traumatisante qu’il décidera de devenir psychiatre.
Pour Boris Cyrulnik, la définition de la résilience : «La notion de se remettre en développement, quand ce développement a été suspendu, a été figé à un événement qui a pu être traumatisant.»
Maintenant qu’on a vu ce qu’est la résilience, on pourrait se poser la question, qu’est-ce qui peut faciliter la résilience et quels sont les facteurs et les choses qui aident, qui facilitent une réponse de résilience ?
Donc la résilience se définit comme étant la capacité d’un individu à rebondir, à se remettre d’un événement de vie difficile pour faire face à l’adversité, les individus utilisent des ressources internes et externes qui sont à leur disposition.
Ses ressources sont appelées :« facteurs de protection »
Les facteurs de protection sont des attributs, comme les forces, les compétences ou les ressources d’une personne, qui augmentent la capacité d’adaptation des individus. Les facteurs de protection permettent de cultiver et de faciliter notre résilience.
Je vous présenterai les 7 facteurs protecteurs :
1) Le sentiment d’auto- efficacité.
2) Les affects positifs : les sentiments agréables.
3) L’estime de soi
4) La satisfaction de vie.
5) L’optimisme.
6) Le soutien social.
7) La spiritualité.
1) Qu’est-ce le sentiment d’auto-efficacité ?
C’est le fait d’avoir confiance dans ses ressources pour atteindre un objectif.
C’est le fait de se dire : « J’ai des ressources et des capacités et je suis confiant pour réaliser et atteindre un objectif. »
2) Les affects positifs, c’est le fait d’avoir des émotions agréables.
Lorsque l’on traverse un événement douloureux qui vous emmène à vous isoler de vos amis, qui vous empêche de faire des activités agréables, alors cet événement va occuper tout l’espace dans votre vie. J’aurai tendance à oublier qu’il y a des choses qui continuent d’être agréables auxquelles je peux me raccrocher pour tenir le temps de la tempête, le temps de la crise, pour garder des espaces ressources, pour continuer d’avancer et me rapprocher au fait que la vie a aussi une dimension plaisante, dimension agréable même si cette période est difficile.
Les personnes possédant des affects positifs, auront des réponses bien plus fréquentes de résilience.
3) L’estime de soi
L’estime de soi est un facteur important de résilience.
En effet, les événements douloureux peuvent aussi impacter notre sentiment de valeur personnelle et la relation que l’on entretient avec soi même. Si on a une estime positive de soi-même, c’est un espace de solidité pour ne pas totalement se remettre en question et ne pas activer les schémas du type : :«Je suis nul, je ne vaux rien… »
Ce sont des schémas très disqualifiants ou dévalorisants que l’on appelle parce un facteur de vulnérabilité. Je traverse un événement douloureux et en plus je m’en veux, tu veux que je me critique, je me culpabilise toute la journée et je me répète tout le temps que je suis nul ce qui va accentuer la peine et la douleur.
Donc on peut dire que l’estime de soi est un facteur protecteur important.
4) la satisfaction de vie.
Le fait d’être satisfait de sa vie, va être aussi un facteur de résilience.
Avoir une vision positive de la vie, et de repérer qu’il y a eu des moments satisfaisants dans notre existence. Et lorsque l’on vit des événements douloureux, cela nous permet de rester en contact à la dimension positive de la vie.
5) L’optimisme.
L’optimisme, comme l’espérance, c’est la ferme conviction que, de façon générale et en dépit des revers et des déconvenues, les choses finissent par toujours s’arranger.
Du point de vue de l’intelligence émotionnelle, l’optimisme est un état d’esprit qui empêche les gens de sombrer dans l’apathie, la dépression et de se laisser envahir par un sentiment d’impuissance dans les périodes difficiles.
Comme la confiance dans l’avenir, l’optimisme est payant (pourvu, naturellement, qu’il reste réaliste, un optimisme naïf pouvant être désastreux).
Pour Martin Seligman, chercheur et psychologue, l’optimisme se manifeste par la façon dont les gens s’expliquent eux-mêmes leurs succès et leurs échecs. L’optimiste considère qu’un échec est toujours dû à quelque chose qui peut être modifié de sorte à réussir le coup suivant, tandis que les pessimistes se reprochent leurs échecs ils attribuent un trait de caractère non modifiable. C’est une manière de voir quant à la manière dont les individus se comportent dans la vie.
Ainsi à une réponse à une déception, comme le fait de ne pas avoir été engagé pour un travail, les optimistes réagissent de manière active et confiante, par exemple, en mettant au point un plan d’action ou en cherchant des conseils ; pour eux un échec est toujours surmontable.
L’optimisme, ce n’est pas imaginer le meilleur mais c’est imaginer qu’il peut avoir des choses qui sont difficiles mais j’ai les capacités de faire face et de traverser ces endroits difficiles dans le futur. Et c’est vraiment un facteur de résilience et de persévérance.
Et c’est l’inverse de l’impuissance apprise.
L’impuissance apprise, c’est par exemple, un individu à la recherche d’un emploi qui se solde par des échecs systématiques ,peut, à terme, éteindre toute combativité pour retrouver du travail. Dans la vie personnelle également, les tentatives de régime, si elles échouent, vont amener la personne à renoncer en se disant « Les régimes ne fonctionnent jamais ».
Autre cas de figure, une personne en quête d’une rencontre amoureuse, confrontée à des refus, va intérioriser ces échecs et mettre en place un système de croyances: le résultat négatif, malgré les actions, sera anticipé et généralisé au point de ne plus rien tenter.
L’estime de soi est alors touchée, la motivation baisse et la dépression s’installe.
Dans le langage, on retrouve certains marqueurs de cet état d’esprit comme les expressions :
« Je ne vais pas y arriver »
« Je ne suis pas fait pour cela. »
« Peu importe ce que je fais, rien ne va changer »
Le présent est douloureux et le futur sera douloureux : peu importe ce que je fais, rien ne changera.
On voit bien ici comment c’est un facteur de RÉSIGNATION
Et c’est un facteur le plus risqué vers le passage à l’acte suicidaire.
Lorsque la personne a un désespoir très élevé, le présent est douloureux, et le futur n’est pas meilleur. C’est un facteur de RÉSIGNATION.
Je n’ai plus aucune raison de m’accrocher à la vie car il n’y a pas un moment au présent plus agréable à vivre.
Ça ce n’est pas la réalité, c’est l’histoire que la personne se raconte sur le futur.
Les personnes qui sont optimistes ont tendance à raconter une histoire sur le futur qui est meilleur, qui est plus satisfaisante.
Et enfin un des derniers facteurs protecteurs de résilience :
6) Le soutien sociale
C’est un des facteurs qui contribue le plus à la résilience, à la gestion, à l’accueil des émotions douloureuses que l’on peut avoir, c’est le fait de s’appuyer sur des personnes, sur des ressources sociales pour traverser les périodes de difficulté. Et ça peut nous aider à différents niveaux.
- Ça peut nous aider à avoir un sentiment de repères quand notre environnement est en changement et en crise.
- Ça peut nous aider à des mouvements de réassurance.
- Ça peut apaiser nos émotions, le temps qu’on partage avec nos amis.
- Ça peut nous aider à changer notre vision des choses.
- Ça peut nous aider à maintenir une estime de nous, quand nos amis nous témoignent de l’importance qu’on a pour eux, du soutien qu’ils nous apportent et peut-être des gestes d’affection, d’amitié, de tendresse.
- Parfois c’est matériel, notre famille peut nous aider financièrement, enlever des facteurs de stress.
- Enlever des facteurs d’insécurité financière.
- Ça peut être aussi : des amis qui nous donnent des conseils pour traverser cette épreuve
Donc ici on a 6 grands facteurs qui vont faciliter la réponse de RÉSILIENCE.
Je résume en quelques phrases les facteurs de résilience :
1. L’AUTO-EFFICACITE - Le fait d’avoir confiance dans ses ressources, ses capacités.
2. LES AFFECTS POSITIFS - Comment développer, cultiver les émotions agréables avec différentes stratégies.
3. L’ESTIME DE SOI - C’est quelque chose qu’on va travailler, pas du côté de l’estime de soi où je dois bien m’apprécier et faire des choses de l’ordre de la réussite pour m’apprécier mais c’est plutôt du côté de l’auto- compassion comment je peux être un ami pour moi -même, que je réussisse ou que j’échoue ,peu importe. Donc ce n’est pas de chercher à forcément à m’apprécier quand je réussis mais comment je peux avoir de l’EMPATHIE pour ma partie qui est VULNÉRABLE, pour ma partie qui souffre dans les périodes douloureuses. Comment je peux avoir de l’apaisement, de l’acceptation de moi.
4. LA SATISFACTION DE VIE - On explore nos valeurs, on explore ce qui fait sens pour nous, on doit apprendre à s’aligner en direction de nos valeurs. Alors notre niveau de satisfaction de Vie augmente par conséquent c’est un facteur protecteur important.
5. L’OPTIMISME - Comment j’explique mes échecs, mes difficultés dans ma vie. Certaines explications vont parfois figer les choses. Exemple : si j’ai une rupture amoureuse, et que j’explique cette rupture amoureuse en disant : « elle /il m’a quitté parce que je ne vaux rien et je ne suis pas digne d’amour » et c’est un schéma qui se répète. On voit bien ici que cette explication là va FIGER les choses pour le futur, il va condamner le futur. Si je ne suis pas digne d’amour, comment je peux retrouver quelqu’un dans la vie ? Alors que si je trouve une explication de cet événement, de cette rupture en disant : « peut-être qu’on n’a pas assez communiqué sur les vrais problèmes de couple et peut-être que c’est ça qui a empêché une adéquation qui nous a empêché de se projeter dans une vie conjugale agréable ensemble. » Là ce n’est pas qui je suis, en tant que personne, et ce n’est pas ma valeur en tant que personne qui est remise en question mais c’est la manière dont on a géré cette relation. « Moi, je n’ai pas su communiquer certaines choses et peut-être ma partenaire n’a pas non plus communiquer d’autres choses. » Et ce n’est pas ma valeur en tant que personne qui est là et qui sera dans le futur, c’est quelque chose de très comportemental.
6. LE SOUTIEN SOCIAL - Explorer nos relations qui sont importantes pour nous et ne pas hésiter à aller chercher du soutien auprès de nos amis, notre famille. On peut rajouter ces deux autres facteurs de résilience pas négligeables.
7. LA GRATITUDE - Le fait de reconnaître et de cultiver un regard appréciatif sur ce qu’on a et sur ce que l’on reçoit nous permet de mieux traverser des phases difficiles.
8. LA SPIRITUALITÉ - Le fait d’avoir une vie spirituelle, des croyances spirituelles, un engagement spirituel c’est un facteur de Coping, d’adaptation importante pour un certain nombre de personnes, la religion aide car elle donne un sens aux épreuves de vie.
Conclusion :
À chaque instant, nous devons apprendre à développer ces facteurs de résilience qui nous aideront à surmonter les épreuves de la vie.
Puisse Hachem nous préserver des difficultés et qu’Hachem , dans son infinie bonté , nous donne le bonheur absolu dans tous les domaines de la vie.