Introduction à la discipline positive
- Keren Gozlan
- 26 Oct. 2022
- Durée : 5 min
Le modèle éducatif d’antan
« L’autorité parentale d’aujourd’hui n’est plus ce qu’elle était ! ». Combien de fois avons-nous entendu cette phrase ? Ou « Il suffisait d’un seul regard de mon père pour que nous cessions immédiatement notre chahut ! ». Alors qu’est-ce qui a changé ? L’autorité absolue d’antan est-elle même souhaitable de nos jours ? Est-ce la seule méthode efficace ? Autant de questions légitimes, que nous pouvons nous poser. Alors sans vouloir rentrer en profondeur dans les raisons qui font que l’autorité parentale a changé, car là n’est pas notre propos, nous avancerons simplement l’idée que la structure familiale et les rôles parentaux ont également évolué. En effet, la structure familiale était bien plus stable et les repères identitaires, quant à la place de chacun, étaient clairs.
Les femmes dans leur grande majorité étaient au foyer se consacrant pleinement à leur intérieur et à l’éducation de leurs enfants tandis que le père œuvrait à ramener la subsistance et faisait foi d’autorité absolue et incontestable. Et cette constellation familiale fonctionnait, et ce malgré un manque de communication et une discipline redoutable car le cadre était fort et donnait une stabilité compensatrice à l’enfant. Aujourd’hui appliquer une telle discipline mènerait sans aucun doute à la révolte des enfants. Beaucoup de Rabanims se prononçant clairement aujourd’hui sur le fait que la fessée est à proscrire et que la communication et l’amour doivent être nos principales alliées.
D’autres solutions sont possibles:
Alors comment se faire écouter et respecter ? Avez-vous entendu parler de la « discipline positive » ? et dans ces deux mots il y a bien le mot « discipline » ! il ne s’agit pas du tout de basculer dans le laxisme et de tout permettre, mais il s’agit avant tout d’établir des règles claires et respectueuses de l’enfant en le faisant coopérer et en établissant une relation de confiance. Il est réellement difficile de nous défaire des modèles parentaux ou ambiants consistant à punir, à poser des ultimatums, à menacer pour se faire obéir en pensant au fond de nous-mêmes qu’il n’y a que ça qui marche, mais soyons honnêtes, si cela marchait, nous ne nous retrouverions pas à devoir réitérer sans cesse nos avertissements. La seule chose qu’apprend un enfant de cette démarche, c’est de chercher des moyens de ne pas se faire prendre la prochaine fois.
Or quel est véritablement notre but en tant que parents et éducateurs ? Est-il de susciter la crainte de la punition avant tout ou bien de leur faire acquérir des compétences de vie comme l’autonomie, la responsabilité et le respect d’autrui. Il est vrai que le résultat n’est pas immédiat et que la collaboration et la coopération se développent à force de temps et d’investissement, mais méfions-nous des résultats immédiats, nous savons, et particulièrement en tant que « juif », que le véritable aboutissement et résultat ne peut découler que de l’effort fourni et dans l’investissement à vouloir cultiver une relation qui se veut à la fois bienveillante et ferme. Le but de la discipline positive est d’obtenir des résultats à long terme et de développer autonomie et coopération.
Il s’agit d’allier « bienveillance » et « fermeté » simultanément. Rudolf Dreikurs qui est un éminent psychologue américain du 20 eme siècle spécialisé dans l’éducation définit la bienveillance comme témoignant du respect du monde de l’enfant et la fermeté comme étant le respect de soi-même, soit du monde de l’adulte et répondant aux besoins spécifiques de la situation. Nous verrons dans les prochains articles comment entreprendre concrètement une telle démarche, mais commençons par la base. Il s’agit donc, avant toute chose, et avant même de corriger le comportement de l’enfant, d’établir le lien2 ar c’est seulement après avoir établi le lien que nous pourrons influencer l’enfant. Mais concrètement, comment faire? Et quels sont les conseils que peut nous apporter la discipline positive à ce propos?
Conseils pratiques pour établir le lien:
1) Ecouter activement l’enfant en lui accordant toute notre attention l’espace d’un instant (sans penser au repas qu’on a à préparer, ni au coup de téléphone qu’on doit passer…). Pour cela, se mettre à sa hauteur, le regarder dans les yeux, manifester des signes d’écoute hochez la tête, ponctuez votre écoute de «ah?, hmm, je vois…» « ah bon ! »: ces petits «accusés de réception» sont importants pour lʼenfant 3et témoignent véritablement du fait que vous l'écoutez
2) Valider ce que ressent l’enfant en le reformulant, il sera alors plus réceptif à ce que nous aurons à lui dire lorsqu’il se sentira compris, il ne faut jamais sous-estimer l'importance de se sentir compris. Aider l’enfant à prendre conscience de ce qu’il vit en mettant des mots sur ses émotions « cela t’a beaucoup énervée que ta sœur ait fait ça ! » « tu as l’impression que c’est injuste » l’aide à développer son intelligence émotionnelle, qui est une capacité essentielle, mais également à extérioriser et donc à prendre de la distance avec son émotion (qui diminuera automatiquement en intensité)
3) Lui parler de notre propre ressenti sans le mettre en cause : Il faut alors remplacer le « tu » accusateur qui le met d’emblée dans une position défensive par le « je » en lui parlant de ce que nous avons ressenti "nous" lorsque nous l’avons vu se comporter comme ça :« cela m’à peiné de voir que.. » au lieu de « Tu es insolent
4) Ne pas donner de qualificatif à l’enfant, mais qualifier ce qu’il a fait : ne pas dire « tu n’es pas gentil », mais « ce que tu as fait est blessant »
5) Se centrer sur les solutions en posant des questions de curiosité à l’enfant : « qu’est-ce que tu as fait ? Qu’est-ce que tu pourrais faire la prochaine fois ? » De cette façon on l’aide à trouver lui-même les solutions et il sera plus à même de les appliquer la fois d’après Voici quelques clés pour créer le lien en situation au lieu de le briser en punissant d’emblée. Comme le dit si bien la psychologue Jane Nelsen « D’où vient cette idée que pour qu’un enfant se conduise mieux, il faut d’abord qu’il se sente dévalorisé ? »
Keren Gozlan